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dimanche 19 février 2012

Liaison CM2-6ème

J'ajoute une rubrique à mon témoignage "Cinq années de maîtresse".
Chaque année, j'étais conviée à une réunion au collège avec les profs de sixième, les collègues de CM2 du secteur, Madame la Principale et Monsieur le Proviseur.
La première année, j'ai discuté avec une collègue jeune et sympa toute la réunion.
La deuxième année, j'ai regretté de ne pas être assise à côté de la même collègue que l'année précédente.
La troisième année, j'ai fait le constat que plus des deux tiers des gens assis autour de la table avait été mes profs ou mes instits.
La quatrième année, j'ai travaillé mon apnée puisqu'assise à côté d'une collègue qui refoulait une odeur, mélange de poils de chiens, de chats, de cigarettes, de sueurs et autres odeurs non identifiées.
En fait, j'écoutais aussi ce qu'il se disait mais ce n'était pas palpitant : ils ne savent toujours pas multiplier et diviser par dix des nombres décimaux !!! Vous nous envoyez des enfants qui ne savent même pas se retrouver dans leur cahier de texte !! Et tous les : nous allons faire une "journée rencontre sport", une "journée rencontre maths", une "journée rencontre lecture"....plein d'idées de journées-vitrines pour montrer qu'on travaille ensemble au primaire et au collège. Bien sûr, elles n'auront pas lieu ou juste avec les enfants qui habitent la ville du collège. Le plus alléchant : créer des outils communs : alors on fait une grille vous répondez oui ou non : ils savent lire ? ils savent compter ? ils savent nager ? Sur une échelle de 1 à 5, ils sont pénibles comment en classe ? Génial !

La cinquième année, le collègue qui m'insupportait car il voulait absolument prendre la parole à chaque réunion pour nous faire part de ces supers stats, du talent certain des futurs collégiens qu'ils préparaient vaillamment et du manque de moyens à l'école primaire publique, du manque d'implication des parents des élèves en difficultés... bla bla bla... était enfin parti à la retraite, je me sentais plus à l'aise pour prendre la parole.
Seulement, je n'ai pas eu le courage, le moment importun, de leur expliquer mon point de vue, pourtant le proviseur m'avait tendu une belle perche : après avoir étalé tout un tas d'idées-vitrines, il parle d'autonomie, débine des idées reçues et donne en exemple mes élèves avec une phrase du genre : les petits campagnards de Saint Silvain, ils risquent de se perdre pour se rendre du collège à la gare routière ! 
Mon pauvre Monsieur ! Mes élèves ils savent ce que c'est qu'être autonome ! Ils savent ce que c'est le collège ! Et ce n'est pas grâce à vos genialissimes inventions-vitrines ! Premièrement, nous sommes allés à Paris en train, nous avons pris le métro, traversé sur des passages cloutés avec des petits bonshommes verts ou rouges et nous n'avons perdu personne ! Et surtout, s'ils ont une idée précise de ce qui les attend, c'est grâce aux anciens élèves qui, dès qu'ils le peuvent, viennent partager notre quotidien, viennent passer une heure ou une demi-journée avec nous, que ce soit pour faire de la peinture, participer au conseil, à la séance d'EPS ou faire de la luge. Là, ils racontent aux autres ce qu'ils vivent, ils répondent à leurs questions. Elle est là la liaison CM2-sixième. Ils viennent aussi me raconter, à moi, leur vie de collégiens. Et aussi, curieux, ils viennent voir comment évolue ma classe et vérifier que les plus jeunes ont su transmettre ce qu'ils leur avaient eux-mêmes transmis.
Les anciens faisaient partie de la vie de la classe, notre fonctionnement intégrait les améliorations qu'ils avaient apportées en conseil, certains de leurs dessins décoraient la classe, et surtout chacun avait laissé sa trace dans l'espace, dans mon esprit, dans mon coeur... 

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